Ornela Vorpsi Le pays où l’on ne meurt jamais

26.04.2006 | Mis à jour le 22.05.2007 | Black
9206 visiteurs  -  1 commentaire

« Je dédie ce livre au mot humilité, qui est absent du lexique albanais. Une telle absence peut donner lieu à des phénomènes très curieux dans la destinée d’un peuple. »

C’est sur cette préface que débute ce court roman, ces quelques nouvelles d’un pays totalement inconnu. Et elle résume bien l’ensemble à savoir que le lecteur y découvre un pays dirigé par la Mère-Parti et de ce fait y est inculqué le culte de la supériorité de l’homme albanais.

« Il semblerait que le premier signe de vie sur terre, le plus primitif, le plus simple, ait été l’amibe : rien qu’une cellule. Puis les choses se compliquèrent : l’amibe commence à se multiplier et à varier en fonction du climat, du milieu, jusqu’au jour où toutes sortes d’espèces apparaissent sur terre. Puis, c’est le tour du chimpanzé, qui ouvre les portes à l’être humain. Ce dernier rêve bientôt de conditions idéales pour lui-même, l’état suprême d’être-au-monde, d’y-être-dans-le-monde : le communisme.

Bref, l’homme est une espèce héroïque, ne croyez-vous pas ? Il suffit de suivre le long parcours de l’amibe au rêve communiste qui frappe à notre porte pour comprendre sa grandeur. »

Tiens-donc, mes instituteurs ne m’ont jamais enseigné l’évolution de l’homme version communiste ! Peut-être un manque, va falloir que je retrouve mes cours d’histoire du primaire...

« Le pays où l’on ne meurt jamais est fait de poussière et de boue, le soleil y brûle au point que, parfois, les feuilles de vigne rouillent et la raison se met à fondre. De là vient peut-être, tel un effet secondaire (et, il faut le craindre, irrémédiable), la mégalomanie, délire qui, dans cette flore, pousse de manière incontrôlable, comme une herbe folle. De là, aussi, l’absence de peur - à moins qu’elle ne soit due à la forme de poterie mal façonnée qui est celle du crâne des autochtones, tordu et aplati, royale demeure de l’insouciance, sinon de l’inconscience. »

Et on plonge dans le quotidien du peuple albanais, où la misère et la pauvreté sont visibles de toutes parts, où le peuple est surveillé et emprisonné pour si peu, un rien. Le tout vu à travers les yeux d’une gamine de 13 ans qui aimait passionnément sa mère et haïssait totalement son père. Et c’est bien grâce à ce regard enfantin, parfois naïf, que les nouvelles défilent sous mes yeux avec de temps en temps un brin d’humour, une note d’espoir mais aussi et malgré tout beaucoup de grandes tragédies humaines.

« A présent, elle et Bukuria sont sans doute au travail dans les champs, piochant la terre, récoltant le maïs, se rééduquant. Il leur est interdit de s’éloigner du camp d’internement, une semi-prison où elles trimeront sans être payées, surveillées à chaque pas, et dormiront dans une baraque de torchis, haïes par les gens du village parce qu’elles sont des putes et que, en outre, elles viennent de la capitale ; l’Albanie entière travaille pour la capitale, qui est le rêve des paysans et leur servitude - toutes leurs récoltes y convergent. »

Univers machiste, conflits conjugaux où l’homme gagne toujours, où les femmes sont considérées comme des objets, et celles qui ont la malchance d’être jolies comme des putes...

« Mais le suicide ne fait pas partie des grandes aspirations du peuple albanais ; celui-ci, dans son éternel combat pour une vie décente, néglige le refuge que la mort peut offrir. »

Alors, pour sortir un peu de cette misère, d’autant plus quand on est une adolescente, on s’évade par les rêves, par les livres. On se raccroche à des petits riens, du moment qu’ils nous apportent un peu de bonheur, des photos, des cartes postales de l’Italie...

(JPG)

Une découverte frappante de l’Albanie... Et dire que ce n’est qu’à quelques kilomètres d’ici...

Un autre monde...

Un autre temps...

Un autre peuple...

Un autre auteur : Ornela Vorpsi

Un autre roman : Le pays où l’on ne meurt jamais


et pour compléter cet article, une petite visite de la galerie de Ornela Vorpsi, la photographe...


 

1 commentaire

Ornela Vorpsi 15 mars 2007 fatmir taraj
 

Poster un nouveau commentaire


Modération de ce forum :

Ce forum est modéré à priori : votre contribution n'apparaîtra qu'après avoir été validée par un administrateur du site.


Emoticones :

(Pour insérer un émoticone, cliquez simplement sur l'image.)

:aime::bof::clindoeil::diable::en_colere::etoile::exclamation::fleur::interrogation::langue::lol::lunettes::mouai::pas_content::pleure_de_rire::rigolo::sourire::surprit::triste::xtra:

Titre :

Texte de votre message :

(Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.)


Lien hypertexte (optionnel)

(Si votre message se réfère à un article publié sur le Web, ou à une page fournissant plus d'informations, vous pouvez indiquer ci-après le titre de la page et son adresse.)


Qui êtes-vous ? (optionnel)


Derniers Commentaires

Articles les plus populaires

Articles les plus consultés

Articles récemment mis à jour

Au hasard

Articles poussiéreux

Too Cool for Internet Explorer

En noir et bleu est motorisé par le logiciel libre Spip 1.8.3 associé au squelette graphique BliP 0.91

20 rubriques ... 318 articles ... 729 commentaires ... sites référencés ... 81 visiteurs par jour (784567 au total)

Haut de page | XHTML 1.0 | CSS 2